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Lettre ouverte u13 EN PAIX

Publié il y a 4 mois par

Lettre ouverte u13  EN PAIX

En paix
Ce samedi 9 décembre, j’ai assisté à un évènement bien particulier. Inhabituel, étrange et sublime à la fois. Moi qui
m’étais habitué à l’ambiance bruyante, vivante, explosive de la légendaire enceinte d’Artas (cette espèce d’arène
Pokémon réputée pour sa quasi-invincibilité et son public déchaîné), cette atmosphère délirante qui m’a rapidement
séduit et à laquelle je participe bien volontiers, je me suis trouvé dans un gymnase au silence apaisant et presque
absurde. Mais, loin d’être déplaisant, ce calme s’est montré salvateur.
Les joueuses artasiennes ont sorti une démonstration de force tranquille. Une force issue du collectif, de ces filles que
j’admire tant et qui ont sorti le meilleur match de leur année. Mais cette fois-ci, sans pression. Sans nécessité de
résultat et de performance, et avec plaisir, avec goût, avec des sourires satisfaits et amusés. Comme l’une d’elles me
l’a avoué à la fin du match, elles se sont “vraiment bien amusées”. Nous voici retournés à l’origine du sport amateur.
Quel bonheur !
Pas un instant ne s’est écoulé sans que les Artasiennes ne déploient tout leur attirail de talents. Cette fois-ci, l’équipe
des championnes que je supporte avec ferveur depuis le début de l’année était au complet : Juliette, Ludivine, Léonore,
Chloé, Sienna, Faustine, Isis, Lola et Manon étaient toutes sur le terrain. Et toutes sur le banc. Toutes sur un magnifique
pied d’égalité, prêtes à se donner à fond pour l’équipe, à tenter des actions pleines d’audace et à révéler leurs
prouesses.
Et bon sang, quel pied ! Quel pied absolu ! Lorsqu’à la mi-temps, le tableau d’affichage laissait entrevoir un beau 22-
20 en faveur de nos joueuses locales, la physionomie du match n’était pas pleinement reflétée par de simples chiffres.
Les Artasiennes ont dominé de la tête et des épaules, avec une classe, une élégance, un sens du collectif tout
simplement remarquables. Les exploits individuels peuvent parfois faire la différence, mais lorsque c’est l’effort
collectif qui parle, c’est une toute autre histoire.
Elles ont montré à tous et à toutes, à leurs parents, à Coach Christian, à toutes les personnes présentes dans ce sacro-
saint gymnase artasien, que seule la pensée collective compte. Les voir s’amuser sur le terrain, tenter des actions
improbables (et réussir !) mais surtout les voir rire ensemble à tour de rôle sur le banc, sans jamais être trop longtemps
sur ou hors du terrain, quelle émotion... Ces grandes sportives ont encore donné une belle leçon, celle de la solidarité,
de l’entraide et de la confiance.
Parce qu’il s’agit bien de confiance. Confiance en soi, confiance en l’autre. En quelques minutes elles se regardent,
elles se commentent, elles s’encouragent. Elles se laissent aller à leur instinct, laissent parler leur dextérité et leur sens
du panier, s’appellent d’un bout à l’autre du terrain, tentent des incursions pour permettre d’avoir toujours une
solution à portée de main. Et moi, ébloui de voir la naissance d’une véritable équipe, je me laisse bercer par les
commentaires des parents autour de moi, qui ne cessent de jubiler de voir leurs remarquables filles (s’)éclater au
grand jour. Je sors difficilement de ma contemplation : le temps s’est arrêté lorsque le groupe s’est enfin soudé.
Il est vrai qu’à la fin du match, le score devait être de 52 ou 54 à 44, une nouvelle défaite. Pour autant, ce n’est pas le
score qui compte : la preuve, je l’ai moi-même oublié ! Le plus important c’est d’avoir, enfin, après trois mois de matchs
brillants et poignants, eu le privilège de voir éclore une équipe. Qui se relaie, qui communique, qui se regarde et se
laisser regarder par le banc et le coach ; sans honte, sans peur, sans pression, sans appréhension. Avec du plaisir, avec
du talent, avec de l’énergie et de l’envie. Il est de ces moments qu’il faut vivre pour les comprendre : ce samedi, j’ai
vu naître une équipe, qui fait mieux que tenir en équilibre. Elle m’a tenu en haleine.
Lorsque je regagne ma voiture sous la pluie naissante, fraîche et portée par le vent, je sens une pointe de frustration.
La semaine prochaine, je n’aurai pas l’occasion de voir mes championnes préférées (Strasbourg m’appelle, et je n’ai
jamais su résister à son charme) alors qu’elles viennent de re-naître. Ce n’est pas une défaite que nous avons eue à
voir : c’est la plus belle des victoires. Celle du collectif. Et quel collectif, je vous le demande ! Peut-on se lasser de les
voir se battre, courir comme des cabris et tenter des passes hors du commun ? Incapable de réprimer mes cris de joie
ou mes exclamations d’admiration, je dois m’avouer incapable également d’être insensible à la naissance d’un groupe
aussi beau.
Défaut professionnel ou non, il faut savoir reconnaître que parfois, même sans le vouloir, les pédagogues deviennent
magiciens. Coach Christian, sur son banc, étrangement reposé, calme et silencieux (à quelques exceptions près,
l’inverse eût été inquiétant), s’est montré fin stratège, non pour les points à gagner, mais pour l’humain à soigner. En
permettant à toutes ses joueuses de bénéficier d’un temps de jeu égal, en riant avec elles sur le banc, en entretenant
une ambiance d’amusement, en leur donnant des conseils avisés à voix reposée, il a redonné au basket sa définition
première : celle d’un jeu. Et d’un très beau jeu.
Dernière image d’un moment béni, le visage de mes Artasiennes favorites. Un visage reposé, satisfait. Un visage calme
et souriant. Des visages en harmonie, en accord. Des visages aux regards bienveillants et fiers. Un ensemble d’yeux
pétillants et de traits lisses, signes d’un moment unique. Car ces filles ont saisi, en l’espace d’un match hors du commun
(le meilleur de leur saison, sans hésiter, je le répète), qu’elles ont gagné bien plus qu’une quarantaine de points. Elles
ont gagné le droit de jouer ensemble et à égalité. En paix.

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