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Lettre ouverte u13F1 Le verrou

Publié il y a 5 mois par

Lettre ouverte u13F1 Le verrou

Le verrou
Lorsque je monte dans ma voiture, à 11h30, il neige. Je ne sais pas si on peut appeler ça de la neige, mais j’ai envie
d’y croire. Il fait un froid glacial, et au fur et à mesure que les paysages défilent devant mon pare-brise, passant des
collines gelées de Saint-Agnin jusqu’aux étendues blanches du Pilat en passant par les feuilles cristallisées des arbres
en bord d’autoroute, je réalise ce que je suis en train de faire. Avec ma voiture immatriculée 69 (fierté lyonnaise
oblige), je me rends dans le département rival de toujours, le cœur léger, jusqu’à St Just St Rambert, dans une salle
probablement bien fraîche, dans le seul but de voir jouer les championnes d’Artas. Oui, j’ai opéré ma mue, c’est
définitif. Je suis devenu un vrai supporter artasien.
D’autant plus que dans ce groupe magnifique, aucune n’est ma fille. C’est ce qui provoque chez moi des bouffées
d’admiration et de fierté égales pour les unes et les autres, sans distinction d’amour filial. Elles sont toutes des
championnes extraordinaires à mes yeux, et elles représentent toutes le courage et l’envie de se battre sur un
terrain, envie que j’ai toujours admirée, ressentie, transmise aussi. Me voilà donc, fougasse en poche, le froid perlant
au bout de mon nez presque barbu, à pousser la porte de la Salle des Sports de St Just St Rambert. Les filles sont là et
viennent m’accueillir avec toute leur naturelle tendresse, leur bonté tranquille. La fête s’annonce joyeuse.
Pourtant, rapidement, en voyant les joueuses s’entraîner (avec un peu de retard), on sent que l’ambiance est
différente qu’à Artas. Ici, c’est la Pontoise. Du moins est-ce ce que scandent fièrement les supporteur.euse.s du club,
et on ne peut pas leur en vouloir de crier leur amour pour leurs championnes... N’est-ce pas la spécialité artasienne ?
Et assez rapidement, malgré nos voix vaillamment portées vers l’avant pour apporter du réconfort aux Artasiennes,
on sent le froid s’abattre sur nous. Nous, le terrain, les filles, Coach Christian, tout semble glacé d’un coup.
Lorsqu’à la mi-temps, le score est de 36-23, je pronostique (un peu gaillardement, il faut le dire) une remontada
digne des grands jours, avec une victoire de nos basketteuses par deux paniers d’écart. Trop ambitieux... Combien de
tentatives talentueuses de Chloé ? Combien de charges rageuses de Faustine ? Combien de rebonds élancés de
Léonore ? De passes stratégiques d’Isis ? De défenses fulgurantes de Sienna ? De percées admirables de Manon ? De
courses enhardies de Ludivine ? De poussées ingénieuses de Lola ? Combien ?... Oui, mais voilà. Parfois, quand ça ne
veut pas, ça ne veut pas.
Que manquait-il ? Quel levier stratégique Coach Christian aurait-il pu utiliser ? Ce n’est à personne d’en juger, et
surtout pas à moi. Le constat reste le même : malgré tous les efforts acharnés de nos championnes, rien n’y fait.
Quelque chose est bloqué. J’ai envie de me lever, de trouver l’incantation magique qui lèverait le verrou qui bloque
leurs tripes. Mais il n’y a pas d’incantation. Le verrou est là, et les ballons n’entrent pas dans le panier. Comme s’ils
avaient décidé que ce n’était pas le bon jour. Pas le bon lieu. Que toutes les forces de l’équipe ne suffiraient pas.
On peut incriminer l’arbitrage - et je dois avouer que je n’ai pas été d’une délicatesse fulgurante à l’égard des
arbitres, bien que courageusement dissimulé derrière ma barbe -, fort discutable, on peut évoquer des conditions
particulières, un public difficile à gérer lorsqu’il est contre soi. On peut trouver mille excuses, mais cela ne servirait à
rien. Finalement, c’est la loi du sport : parfois, ça ne marche juste pas. Et ce qu’il faut retenir est bien ailleurs. Il est
dans cette splendeur qu’ont les filles à se battre jusqu’au bout, menées par leur Mestre Coach. A ne rien lâcher,
malgré tout, malgré la déception.
Alors oui, lorsque l’horrible et désagréable alarme de la Salle des Sports de St Just St Rambert sonne le glas, sur un
douloureux 55-33, je suis déçu. Pas déçu d’être venu, non, jamais. Déçu pour les filles, et non par les filles. Elles ne
déçoivent jamais, tant elles font preuve d’un courage et d’une envie de gagner ensemble qui me fascine. Mais je suis
déçu pour elles, d’avoir vécu un match long et difficile, d’avoir donné tout leur talent (avec des poussées collectives
fabuleuses, à en donner des frissons !), pour ne récolter qu’une défaite. Pour certaines, c’était possiblement un des
meilleurs matchs que j’ai eu à voir d’elles, et le résultat ne leur rend pas l’hommage qu’elles méritent.
En rentrant dans ma voiture (qui heureusement n’a aucun pneu crevé et aucun sticker de l’ASSE collé sur la plaque
d’immatriculation, Juninho soit béni), je me rends compte que je suis renfrogné. Un peu triste. Et lorsque je tourne la
clé dans le contact, je comprends qu’elles m’ont converti. Je ne suis plus un simple amateur de basket qui vient voir
ses anciennes élèves. Je suis un fan, un supporter, un tifosi artasien, prêt à faire des kilomètres pour voir son équipe
jouer, qu’importe le résultat. Et je dois avouer quelque chose : qu’elles perdent, qu’elles gagnent, rien ne change la
fierté que j’éprouve à leur encontre. Plus que de simples joueuses, ces filles-là ont une beauté rare : elles sont
humaines, profondément humaines. Et comme tout être humain, elles savent accepter que lorsque ça ne veut pas,
ça ne veut pas.
A charge de revanche face à la fatalité... La semaine prochaine s’annonce savoureuse ! Vivent les Artasiennes !

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